A l’heure où le Marathon de Paris se prépare, où les novices profitent du printemps pour arpenter les sentiers forestiers, nous vous présentons ce mois-ci le film Free to run, un must pour les amoureux de la course à pied et un documentaire passionnant.
L’histoire du running embrasse des thèmes variés et inatendus comme la liberté, la discrimination ou l’explosion du business des courses …
« Il est étonnant qu'un geste aussi simple puisse porter autant de valeurs militantes, analyse le réalisateur. L'essor du running n'est finalement qu'un miroir des luttes sociales et politiques de ces quarante dernières années. »
Si les coureurs se comptent aujourd'hui par millions dans le monde, il y a à peine 50 ans, cette pratique était mal perçue, réservée aux hommes, cantonnée aux stades, avec des règles strictes et sexistes. Associant témoignages inédits et images d'archives et bâti autour du destin de quatre personnages emblématiques, Free to Run, sorti sur nos écrans en 2016, raconte la fabuleuse épopée de la course à pied, acte marginal et militant devenu phénomène populaire et universel, depuis les années 1960, jusqu’à son apogée dans les années 1990.
Des pionniers du Bronx, qui passaient pour des hurluberlus "courant en sous-vêtements" dans la rue, aux athlètes suréquipés d'aujourd'hui, Pierre Morath, historien du sport et ancien athlète franco-suisse, dresse une galerie de portraits édifiante et suscite une réflexion profonde.
Il questionne notamment sur l'évolution de la place de la femme dans le sport, en suivant l’américaine Kathrine Switzer, première femme à avoir couru un marathon, celui de Boston, en 1967. Aux Jeux olympiques, les épreuves dames ne vont pas au-delà de 800 mètres, alors courir un marathon... Les moqueries, les coups, l’organisateur qui la retient par le bras pour l’empêcher de courir… Elle a dû mener un véritable combat pour pouvoir courir avec et comme les hommes. Kathrine Switzer finit par créer en 1976 le premier circuit international de courses féminines et assiste à l'entrée de la première marathonienne dans le stade olympique de Los Angeles, en 1984.
La brève carrière de Steve Prefontaine, le James Dean de la piste est évoquée. Il lutta pour que le statut d'amateur soit reconsidéré. Les fédérations toutes-puissantes d'athlétisme refusant de lui verser le moindre centime, il demanda à une petite boutique de chaussures de sport de l'Oregon, de l'aider. Et il devint le premier athlète sponsorisé par Nike !
On croise également la route de Fred Lebow, fantasque personnage qui fit sortir le marathon de New York de Central Park, en fit une vitrine de la réussite américaine, et par-là même, un événement planétaire à ne pas rater. La célèbre course, qui comptait 127 participants en 1970, déjà 10 000 en 1978, en est à plus de 50 000 aujourd'hui.
Le documentaire retrace magnifiquement ces combats. Après quoi court-on ? S’interroge-t-il... Après le défi, la performance bien sûr, la recherche de soi aussi. Mais, surtout, après une certaine idée de la liberté.
C’est une ode au dépassement de soi, à la nature et à la liberté. Après l’avoir vu, on comprend bien le sens de cette question entendue dans le film : « je ne sais pas pourquoi, il y a des millions de gens qui courent, mais ce que j’aimerais savoir, c’est pourquoi tout le monde ne court pas ? »